Entretien avec Jean Claude Dardelet accordé à Geneviève Saint-Hubert, Secrétaire Générale de la Maison de l’Europe.
Monsieur Dardelet, pouvez nous nous expliquer votre rôle à Toulouse et à la Métropole, et l’importance que vous accordez au dispositif des Consultations citoyennes lancées au Parlement européen à Strasbourg le 17 mai dernier ?
Elu à la Ville de Toulouse et Vice-Président de Toulouse Métropole, je suis en charge des partenariats internationaux et des sujets européens.
L’Europe est un sujet qui me tient à cœur depuis des années. Je m’y suis tout d’abord consacré professionnellement pendant plus de 20 ans en tant que contributeur de la première heure d’un sujet central pour Toulouse: le spatial et ses filières industrielles et de recherche notamment. Non sans quelques résultats.
Aujourd’hui, c’est au titre de Toulouse et de sa métropole que j’apporte mon expérience sur deux points d’importance.
Tout d’abord la désaffection d’un nombre croissant d’habitants sur le sujet européen. Quel paradoxe alors que nous n’avons jamais eu autant besoin d’elle !
Les défis auxquels nous devons faire face ne relèvent plus de villes ou de pays au grès d’alliances de circonstance mais d’actions collectives coordonnées par des institutions compétentes et dotées de moyens à la hauteur. Le changement climatique, la sécurité aux frontières, les grandes interconnections dans les transports, le numérique et l’énergie ou encore les migrants et les sujets sociaux qui ne sont pas les moindres de ces enjeux. Mais avec des taux de participation de 30% aux élections européennes, le compte n’y est pas pour impulser la dynamique qui conviendrait. Alors il faut écouter, partager, échanger, et faire remonter les messages que toutes et tous ont sur le cœur, leurs attentes, leurs espoirs, leurs espérances, leurs visions. Refonder l’Europe par le dialogue. Six thématiques de discussion sont proposés : prospérité et emploi, développement durable, sécurité, monde, innovation et unité.
Là est tout l’enjeu des consultations citoyennes impulsées par la France il y a quelques mois. Une initiative ensuite rejointes par 26 des 27 Etats membres de l’Union européenne. Un pari audacieux qui n’était pas gagné tant les résistances sont parfois grandes quand il s’agit d’innover et de construire. L’on peut d’ores et déjà parler de succès car la discussion est facilitée.
Le grand rendez-vous électoral de mai 2019 n’attendra pas. Le suivant n’interviendra que six ans plus tard. Chaque Etat-membre s’est donc engagé à collecter les messages de ses concitoyens d’ici novembre prochain. La synthèse de cette réflexion collective sera ensuite présentée au Conseil européen de décembre 2018. Je rappelle que le Conseil européen des chefs d’Etats et de gouvernements a pour mission première de fixer le cap politique de l’action européenne. C’est donc bien à ce niveau qu’il faut agir.
Alors à Toulouse, nous avons décidé de prendre notre part et de lancer et accompagner plusieurs consultations citoyennes sur les sujets qui nous sont chers: la formation, la jeunesse, l’innovation, la recherche, l’environnement pour ne citer qu’eux. Plusieurs ont déjà eu lieu. La participation est importante et les échanges nourris.
Vous occupez une autre fonction au sein d’une association européenne, l’Afccre. Pouvez-vous nous en parler ?
Oui, un mot maintenant sur mon rôle de Vice-Président de l’Association française du collège des communes et des européennes (Afccre). Un réseau de près de 1 000 collectivités territoriales françaises. Un réseau européen et mondial particulièrement actif et influent sur les sujets européens. J’y interviens d’une part au bureau national et d’autre part comme membre de la task-force sur l’avenir de la politique de cohésion.
Car un deuxième grand rendez-vous européen est en préparation. Celui de l’élaboration du budget de la prochaine perspective financière qui ira de 2021 à 2027. Un budget en cours de construction qui doit faire face à bien des nouveautés : le départ des britanniques, les nombreux sujets qui se sont invités depuis le dernier exercice (tel qu’évoqués précédemment) mais aussi, pour nous français, les récentes réformes territoriales qui ont vu la fusion des régions et la formation de grandes métropoles aux enjeux européens et auxquels s’ajoutent la contractualisation entre l’État et 322 collectivités et EPCI en France qui pourrait bien fragiliser leur accès aux fonds européens du simple fait des règles comptables publiques.
Un exercice difficile à plus d’un titre n’est pas un vain mot. Tiraillements européens (habituels) entre Est, ouest, nord et sud, du bon usage des fonds de cohésion (moins habituels), et nouveaux défis particulièrement politiques (évoqués précédemment), voilà l’équation à résoudre. La critiquer, la persiffler et faire tous les raccourcis simplistes dont beaucoup sont friands ne résoudra rien. Car les défis sont là, nos voisins géographiques n’ont pas prévu de déplacer leur pays et plus personne seul n’a les moyens de résoudre les problèmes.
Alors ayons confiance, l’Europe nous a tellement apporté, elle vaut le coup qu’on s’intéresse un peu à elle. De manière constructive et responsable.
Jean-Claude DARDELET
Conseiller Délégué à la Mairie de Toulouse
Vice Président de Toulouse Métropole
Coordination et promotion des affaires européennes et du développement international
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